La fiscalité des artistes dans tous ses états

Le régime fiscal des artistes est un régime spécial du fait du caractère spécifique de la profession mais aussi de la multitude de régimes sur option et de retenues à la source que le code général des impôts lui offre, ce qui en fait un cabinet de curiosités.

Le caractère spécifique de la profession tient à la durée de l’activité qui peut être de courte, les prestations peuvent se dérouler dans plusieurs pays différent, la frontière entre artiste indépendant et artistes salarié est parfois ténue, l’artiste peut disposer de droits d’auteur de cachet de droits de représentation et de revenus accessoires…

L’activité d’artiste est  un secteur d’activité  criminogène pour l’administration fiscale dans la mesure où c’est un domaine dans lequel les risques d’évasion fiscale et de fraude sont importants par la dimension internationale des professions et la spécificité des régimes avec ou sans renonciation, sur option avec ou sans retenue à la source.

Au sens de l’article 4A du CGI, les personnes qui résident en France au sens de l’article 4B du CGI, sont soumis à l’impôt sur les revenus sur l’ensemble de ses revenus perçus à travers le monde (principe de mondialité de l’impôt).

Cependant, aux termes des articles 165 A et B, si le contribuable ne réside pas en France, il sera soumis à l’IR français uniquement pour les revenus de source française (principe de territorialité de l’impôt). Sont considérés comme revenus de source française, les revenus d’activités professionnelles exercées en France, et les sommes relatives aux prestations artistiques notamment.

En conséquence, le principe de territorialité de l’impôt permet au fisc français d’appréhender et taxer les revenus des non résidents.

  • Nature juridique des revenus des artistes : des droits d’auteur(1).
  • Nature fiscale des revenus des artistes : BNC SALAIRE BIC (1) avec des régimes de déductions de frais et de TVA spécifiques(2).
  • Qui est imposable en France : tous les artistes qui se produisent en France (3)

1/ la nature des revenus des artistes auteurs et leurs régimes d’imposition

Les revenus des artistes auteurs sont par nature juridique des droits d’auteur et par nature fiscale des BNC.

Toutefois le code général des impôts a institué des régimes spéciaux :

1.1/ Le régime de l’article 93-1 quater du code général des impôts : des salaires

Les droits d’auteur perçus par les auteurs d’œuvres de l’esprit mentionnées à l’article L 112-2 du Code de la propriété intellectuelle (notamment : écrivains, auteurs et compositeurs, auteurs d’œuvres cinématographiques, peintres, graveurs, dessinateurs, illustrateurs, photographes, architectes) sont soumis à l’impôt sur le revenu selon les règles prévues en matière de traitements et salaires lorsqu’ils sont intégralement déclarés par les tiers.

Les droits d’auteur payés par des éditeurs, producteurs, organismes de gestion collective (type SOFIA, SACD, SACEM, ADAGP, SAIF, etc) mais aussi les cachets pour une représentation sont déclarés par défaut en traitements et salaires.

Le régime spécial s’applique automatiquement, que l’activité soit exercée à titre principal ou accessoire, dès lors qu’ils sont intégralement déclarés par le débiteur ou la partie versante ou sont de source étrangère

Les intéressés peuvent cependant y renoncer et opter pour le régime de droit commun des BNC. Cette option, jointe à la déclaration spéciale des BNC, vaut pour l’année au titre de laquelle elle est exercée et les deux années suivantes. Elle est irrévocable durant cette période.

Le régime spécial ne prive pas les droits d’auteur de leur caractère de BNC. Il s’ensuit que les droits d’auteur donnent lieu au paiement d’acomptes pour l’application du prélèvement à la source.

En cas de contrôle et de rectification, leurs titulaires bénéficient des garanties propres à cette catégorie de revenus, notamment du droit de saisir la commission des impôts.. La déclaration spéciale de résultat n’a pas à être souscrite. “

1.2/ Le régime des artistes du spectacle article L7121-2 du code du travail : des salaires sans option de renonciation.

Sont, notamment, considérés comme des artistes du spectacle, l’artiste lyrique, l’artiste dramatique, l’artiste chorégraphique, l’artiste de variétés, le musicien, le chansonnier, l’artiste de complément, le chef d’orchestre, l’arrangeur-orchestrateur et, pour l’exécution matérielle de sa conception artistique, le metteur en scène.

Tout contrat par lequel une personne physique ou morale s’assure, moyennant rémunération, le concours d’un artiste du spectacle en vue de sa production est présumé être un contrat de travail dès lors que cet artiste n’exerce pas l’activité objet de ce contrat dans des conditions impliquant son inscription au registre du commerce et des sociétés.

Cette présomption subsiste quels que soient le mode et le montant de la rémunération ainsi que la qualification donnée au contrat par les parties. Elle n’est pas non plus détruite par la preuve que l’artiste conserve la liberté d’expression de son art, qu’il est propriétaire de tout ou partie du matériel utilisé ou qu’il emploie lui-même une ou plusieurs personnes pour le seconder, dès lors qu’il participe personnellement au spectacle.

La rémunération du  concours de l’artiste au spectacle, communément appelé un cachet a le caractère de salaire et doit être taxé comme tel.

Toutefois, les profits réalisés par les artistes qui organisent pour leur propre compte des représentations ou des concerts entrent dans le champ d’application des bénéfices non commerciaux.

Mais ces profits sont imposables au titre des bénéfices industriels et commerciaux, lorsque, compte tenu des conditions dans lesquelles les artistes se livrent à cette activité, ceux-ci peuvent être réputés exercer la profession commerciale d’entrepreneur de spectacles.

1.3/ Les autres revenus des artistes : BNC

Les revenus des activités accessoires, des revenus artistiques provenant d’autres sources : associations, particuliers, établissements publics ou scolaires participent du régime des BNC et doivent être déclarés et taxés comme tels.

1.4/ Le régime de l’article 100 bis du code général des impôts : régime du bénéfice moyen sur 3 ou 5 ans.

Lorsqu’ils sont soumis au régime de la déclaration contrôlée, les titulaires de bénéfices provenant de la production littéraire, scientifique ou artistique, ou de la pratique d’un sport peuvent demander à être imposés sur la base d’un revenu égal à la moyenne des bénéfices de l’année d’imposition et des deux ou quatre années précédentes

Ce régime ne s’applique qu’aux bénéfices retirés d’une activité directement exercée par les contribuables, ce qui exclut les héritiers et légataires.

Les artistes du spectacle et les sportifs salariés peuvent opter pour l’imposition de leurs salaires selon les mêmes modalités : moyenne triennale ou quinquennale des salaires perçus diminués des frais professionnels (CGI art. 84 A). Les revenus des sportifs ne provenant pas des activités sportives proprement dites (recettes publicitaires, par exemple) sont exclus du régime

L’option est exercée en général lors du dépôt de la déclaration de bénéfice. Mais elle peut également être formulée, dans les délais de prescription, par voie de réclamation contentieuse ou à la suite d’une procédure de rectification, ce qui est susceptible d’entraîner la révision des impositions ultérieures déjà établies.

Le choix de la période de référence – trois ou cinq ans – doit être expressément mentionné et ne peut par la suite être modifié.

L’option est possible même si aucun revenu n’a été perçu au cours des années antérieures : un montant de revenu nul est alors retenu pour les années en cause.

Elle peut être révoquée. La demande de révocation doit être jointe à la déclaration de bénéfices de l’année au titre de laquelle le contribuable souhaite que le régime du bénéfice moyen cesse de s’appliquer.

Ce régime continue toutefois à produire ses effets, pendant une période transitoire, pour l’imposition de la fraction non encore taxée des bénéfices réalisés au cours des années couvertes par l’option.

Ce système permet d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt. Il ne doit cependant pas être adopté si le contribuable a réalisé des bénéfices plus importants au cours des années précédant l’option, car ces bénéfices déjà taxés entrent à nouveau dans la base d’imposition.

2/ Le régime de la déduction des frais des artistes et de la TVA a nature des revenus des artistes auteurs et leurs régimes d’imposition

2.1/ Les frais déductibles

Dans le cadre des frais réels, les auteurs d’œuvres de l’esprit peuvent déduire le prix d’acquisition des matériels et mobiliers dont la valeur unitaire n’excède pas 500 € et la dépréciation annuelle (sous forme d’amortissement linéaire) des matériels dont la valeur excède ce montant.

Par mesure de simplification, l’administration permet d’appliquer au montant brut des droits perçus, diminué des cotisations versées au titre du régime de sécurité sociale, une déduction de 3 % couvrant les frais suivants : documentation générale (autre que la documentation technique), réceptions à domicile, voyages, communications téléphoniques et fournitures diverses (papeterie, supports d’enregistrement…).

En cas d’activité salariée parallèle, le plafonnement de la déduction de 10 % s’applique globalement.

Enfin, lorsque les droits d’auteur sont soumis à la retenue de TVA et que le contribuable pratique la déduction forfaitaire pour frais, le montant des sommes imposables doit être retenu hors TVA et augmenté du forfait des droits à déduction de TVA.

En cas d’option pour les frais réels, les droits d’auteur sont pris en compte TTC et la TVA versée au Trésor fait partie des dépenses professionnelles déductibles.

2.2/ La TVA

Le code général des impôts offre deux dispositifs spécifiques aux artistes auteurs et des taux différenciés selon les activités.

2.2.1/ Franchise en base de TVA :

L’article 293-B-III du code général des impôts instaure une franchise en base de TVA spécifique aux artistes-auteurs leur permettant de ne pas soumettre leurs recettes artistiques (droits d’auteur, ventes d’œuvres, activités dites « accessoires ») à la TVA si leur montant n’excède pas un seuil fixé à 44 500 € HT (en 2020, 2021 et 2022). Ils sont également dispensés de la facturation de la TVA pour leurs activités autres que celles visées ci-dessus, lorsque le chiffre d’affaires réalisé au titre de ces autres opérations au cours de l’année civile précédente est inférieur à 18 300 €.

En cas de dépassement des seuils ouvrant droit à la franchise en base de TVA, la franchise continue à s’appliquer jusqu’à la fin de l’année, et ce n’est qu’à compter du 1er janvier de l’année suivante que l’artiste-auteur devient redevable de la TVA. Toutefois, si l’artiste-auteur dépasse un seuil majoré de 54 700 € HT (ou le seuil majoré de 22 100 € pour leurs autres activités), l’assujettissement à la TVA est effectif dès le 1er jour du mois du dépassement.

Toutefois quel que soit le montant de ses recettes, l’artiste-auteur peut renoncer à la franchise en base de TVA (exonération de TVA sur les recettes et non récupération de la TVA sur les dépenses) et opter pour l’assujettissement à la TVA (facturation de la TVA sur les recettes et déduction de la TVA sur les dépenses).

L’option prend effet au 1er jour du mois au cours duquel elle est déclarée. Cette option doit être formulée par écrit. Le service des impôts des entreprises compétent pour recevoir la déclaration est celui du lieu d’exercice professionnel.

L’option couvre obligatoirement une période de deux années (y compris celle de la demande).

Elle est renouvelable par tacite reconduction, sauf dénonciation à l’expiration de chaque période. Toutefois, elle est reconduite de plein droit pour la période de deux ans suivant celle au cours ou à l’issue de laquelle l’artiste-auteur ayant exercé cette option a bénéficié d’un remboursement de crédit de TVA.

2.2.2/ Retenue à la source de la TVA sur certains droits d’auteur :

L’article 285 bis du code général des impôts institue un dispositif dispensant de toute obligation déclarative à l’égard de la TVA, les artistes-auteurs qui perçoivent des droits d’auteurs d’éditeurs, de producteurs ou d’organismes de gestion collective. (type SOFIA, SACD, SACEM, ADAGP, SAIF, etc…), les mêmes artistes-auteurs qui participent du régime de l’article 93-1 quater du code général des impôts en déclarant des salaires. 

Ce dispositif concerne aussi bien les artistes-auteurs éligibles à la franchise en base que les artistes-auteurs redevables de la TVA

Selon ce dispositif, les éditeurs, les producteurs et les organismes de gestion collective opèrent sur les droits d’auteurs versés aux artistes-auteurs une retenue de la TVA « due » par l’auteur, y compris lorsque l’artiste-auteur est en franchise.

Cette retenue est égale au montant de TVA calculée au taux légalement applicable sur les droits d’auteurs (10 %) diminué d’un droit à déduction fixé forfaitairement à 0,80 %, soit une retenue nette de 9,20 %

Exemple :

Droits dus par un éditeur : 1000 € HT.

Montant de la retenue de TVA : (1000 x 10 %) – (1000 x 0,80 %) = 92 €

Droits nets versés à l’artiste-auteur : 1100 € – 92 € = 1008 € (montant TTC – retenue de TVA).

La taxe déductible de sa propre TVA pour l’éditeur s’élève à 100 €. Ainsi le montant de TVA versé sur les droits d’auteurs par l’éditeur n’est pas une charge pour lui, il vient en déduction du montant de TVA qu’il doit verser au Trésor public. Le taux de TVA applicable aux éditeurs est de 2,1 % (presse) ou 5,5 % (livre)…

L’artiste-auteur peut renoncer à la retenue de TVA (règlement de la TVA à 10 % sur les recettes avec une déduction forfaitaire de 0,8 %) et opter pour l’assujettissement à la TVA (facturation de la TVA sur les recettes et déduction de la TVA sur les dépenses).

Il doit alors informer l’ensemble des éditeurs, producteurs et organismes de gestion collective lui versant des droits d’auteurs, ainsi que le service des impôts des entreprises dont il relève.

Cette renonciation vaut alors pour l’ensemble des droits que l’auteur perçoit.

Elle prend effet au 1er jour du mois qui suit celui au cours duquel elle est déclarée, et couvre obligatoirement une période de 5 années (y compris celle de la demande).

Elle est tacitement reconductible par période de 5 années, sauf dénonciation dans les trente jours précédant l’expiration de chaque période.

Toutefois, elle est reconduite de plein droit pour une nouvelle période de cinq ans suivant celle au cours ou à l’issue de laquelle l’artiste-auteur ayant formulé la renonciation a bénéficié d’un remboursement de crédit de TVA.

2.2.3 / l’optimisation pour les artistes-auteurs : l’assujettissement à la TVA et la renonciation au régime de la retenue de TVA

Pour les artistes-auteurs, trois profils fiscaux: ceux qui sont en franchise en base de TVA, ceux qui sont assujettis de façon usuelle à la TVA et ceux dont la TVA est retenue à la source avec une déduction forfaitaire de 0,8 %.

Le seul cas qui n’implique aucune somme à la charge de l’artiste-auteur et qui permet un éventuel crédit de TVA est celui de l’assujettissement à la TVA.

En franchise, l’artiste-auteur paye l’intégralité de la TVA sur ses dépenses sans pouvoir la déduire de sa TVA collectée.

Enfin, le dispositif de la retenue de la TVA à la source est le dispositif qui rapporte le plus au trésor public et le moins à l’artiste.

Pour pouvoir faire un comparatif  le postulat de départ est le suivant :

Un artiste-auteur dont les recettes sont constituées exclusivement de droits d’auteurs versés par des organismes de gestion, des éditeurs et/ou des producteurs (les tiers déclarants fiscaux).

Selon ses propres choix, il peut soit être en franchise, soit être assujetti, soit être en retenue à la source. Il perçoit 10 000 € de recettes HT et ses dépenses s’élèvent à 3400 € HT. S’agissant de droits d’auteur, le taux de TVA applicable sur ses recettes est de 10 %, cependant que sur ses dépenses nous avons pris par simplification un taux normal de TVA à 20 % (soit 3400 € + 680 € = 4080 € TTC).

Le tableau ci-après  montre que  l’avantage pour l’artiste- est l’assujettissement à la TVA.

Artiste en franchise de TVATVA versée au trésor publicTVA payée par l’artiste  non déductible restant une charge
Recettes HT 10.000€     0€    680€  
Dépenses HT 3 400€TVA 680€ 
Bénéfices : 5.920€  
Artiste assujetti à la TVA  
Recettes HT 10.000€TVA collectée 1000€    320€ (1000€-680€)    0€
Dépenses HT 3 400€TVA 680€
Bénéfices 6.600€
Artiste soumis à la retenue à la source TVA  
Recettes HT 10.000€TVA collectée 1000€ par un tiers    920€ (1000€-80€)    600€ (680€-80€)
Dépenses HT 3 400€TVA 680€-80€(forfait tva retenu à la source)
Bénéfices 6.000€

En conclusion, l’artiste doit opter pour l’assujettissement à la TVA dans tous les cas d’imposition.

2.2.4/ les différents taux

Les artistes sont soumis à la TVA pour « leurs livraisons de biens et leurs prestations de services » à titre onéreux.

Les « livraisons de biens » soumises à TVA s’entendent notamment :

  • des ventes d’œuvres originales effectuées par l’artiste-auteur
  • des ventes d’œuvres dont l’artiste-auteur assure lui-même la reproduction et la diffusion
  • des ventes des exemplaires des œuvres lorsque l’artiste-auteur publie à « compte d’auteur »

Les «  prestations de services  » soumises à TVA s’entendent notamment des cessions de droits d’auteur et de toutes opérations liées à l’exploitation des œuvres :

  • droit de représentation
  • droit de reproduction
  • droit de rémunération pour copie privée

Taux

Le taux de TVA pour les ventes d’œuvres originales est de 5,5 %.

Le taux de TVA pour les cessions de droits d’auteurs est de 10 %.

Le taux normal de TVA est de 20 %.

Les aides à la création ou bourses versées par divers organismes publics ou privés sont exonérées de TVA (le taux de TVA est de 0 % sauf si elles ont pour contrepartie une livraison de biens ou une prestation de services ou si elles constituent le complément du prix d’une opération imposable).

Les taux de TVA pour les activités dites « accessoires » des artistes-auteurs dépendent de la « prestation » concernée.

Par exemple, quand ils sont rémunérés directement par les élèves, les cours donnés dans l’atelier ou le studio de l’artiste-auteur, les ateliers de pratiques artistiques ou d’écriture, sont exonérés de TVA en vertu de l’article 261, 4-4°-b du code général des impôts.

3/ Le régime des artistes non résidents et les dispositifs anti abus

Alors qu’il existe un régime et les modalités précises permettant l’imposition des artistes non résidents en France, il est néanmoins possible d’échapper au fisc par l’intermédiaire de sociétés-écrans, ce qui a généré la mise en place d’un dispositif efficace l’article 155 A du Code général des impôts.

3.1/ Le régime de l’article 182 A bis du code général des impôts pour les artiste non résidents

Ce texte s’applique aux articles du spectacle (cinéma, musiciens, chefs d’orchestres).

Il pose le principe de la retenue à la source pour les revenus des artistes non résidents. La retenue s’applique aux rémunérations résultant de prestations artistiques quelle que soit leur qualification, résultant d’un salaire ou d’une activité indépendante, quel que soit le bénéficiaire (personne morale, artiste lui-même ou représenté).

La retenue à la source n’a pas de caractère libératoire, l’artiste non résident sera redevable de l’impôt sur le revenu sur une base nette et devra déposer une déclaration de revenus.

Depuis un arrêt du Conseil d’État du 17 février 2015, il est  autorisé à certains non-résidents ayant eu une activité en France de demander le remboursement partiel de la retenue à la source si celle-ci excède le montant de l’impôt obtenu par la déclaration de revenus.

Ce régime permet à l’administration fiscale d’éviter l’absence totale de paiement de l’impôt par le contribuable. Il prévoit :

  • une retenue à la source spécifique de 15% ou 75% selon i que le non résident soit domicilié ou pas dans un territoire non coopératif sauf si le débiteur apporte la preuve que les sommes correspondent à des opérations réelles ayant un objet et objectif autre que celui d’éluder l’impôt dans cet autre état.
  • Un abattement de 10% au titre des frais professionnels déductibles du montant de la retenue à la source.

Cette retenue à la source s’applique aux :

  • sommes payées en contrepartie de prestations artistiques fournies, c’est-à-dire, matériellement exécutées en France ; ou utilisées en France, c’est à-dire en cas de cession ou de concession en France de droits d’exploitation d’une œuvre ;
  • sommes versées par un débiteur exerçant une activité en France ;
  • sommes payées à des sociétés n’ayant pas d’installation professionnelle permanente en France.

Ainsi, la retenue à la source de l’article 182A bis du Code général des impôts s’applique aux rémunérations résultant de prestations artistiques quelle que soit leur qualification, résultant d’un salaire ou d’une activité indépendante ; ou bien quel que soit leur bénéficiaire, l’artiste lui-même ou bien représenté, ou encore d’une personne morale

Pour alléger leur charge fiscale, les artistes ont imaginé divers montages ce qui a conduit à la mise en place du dispositif de l’article 155 A du code général des impôts.

3.2/ Le  dispositif de l’article 155 A du code général des impôts pour les artistes non résidents et les artistes résidents

Dans la perspective d’alléger leur charge fiscale et de faciliter la négociation de contrats les artistes ont eu recours à l’utilisation de prestataires de services, personnes morales qui agissent pour leur compte en leur reversant des salaires.

Ce montage fiscal par la création d’une société écran  autrement connu sous le nom anglophone « rent-a-star system » permet de localiser dans un État à fiscalité favorable la différence entre la rémunération perçue par la personne morale (prestataire de services apparent) et le salaire versé à l’artiste (prestataire réel)

L’artiste  qu’il soit résident ou non résident crée une société établie hors de France dans un pays à fiscalité réduite afin de facturer depuis l’étranger ses prestations effectuées sur le territoire national L’artiste ne déclare en France que des salaires modestes que lui verse la société étrangère

Ce montage peut permettre de dissimuler l’identité du véritable détenteur des parts de la société étrangère grâce à un prête-nom.

La société possède toutes les apparences d’une véritable société (siège social, dénomination, qui a accompli toutes les formalités de publicité nécessaires) mais elle  n’a aucune existence propre, étant destinée à masquer les agissements d’un tiers, le maître de l’affaire, qu’il ait ou non la qualité d’associé.

Pour éviter cette évasion fiscale l’article 155 A du code général des impôts a été institué en 1979 puis modifié et dispose notamment :

« I. Les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors de France en rémunération de services rendus par une ou plusieurs personnes domiciliées ou établies en France sont imposables au nom de ces dernières :

– soit, lorsque celles-ci contrôlent directement ou indirectement la personne qui perçoit la rémunération des services ;

– soit, lorsqu’elles n’établissent pas que cette personne exerce, de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale, autre que la prestation de services ;

– soit, en tout état de cause, lorsque la personne qui perçoit la rémunération des services est domiciliée ou établie dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France où elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens mentionné à l’article 238 A.

II. Les règles prévues au I ci-dessus sont également applicables aux personnes domiciliées hors de France pour les services rendus en France.

III. La personne qui perçoit la rémunération des services est solidairement responsable, à hauteur de cette rémunération, des impositions dues par la personne qui les rend.

L’article 155 A du code général des impôts permet donc une taxation du prestataire réel et non pas du prestataire apparent que constitue la société écran. 

L’administration pourra taxer l’artiste directement sans recourir à la théorie de l’abus de droit qui exécute  des prestations de services facturées par la société écran .

L’article 155 A du CGI envisage deux hypothèses :

– Soit celle d’un prestataire domicilié ou établi en France et dont la rémunération est perçue par une personne domiciliée ou établie hors de France

 – Soit celle d’un prestataire domicilié ou établi hors de France qui rend des services en France

Aussi, les sommes perçues par une personne domiciliée ou établie hors France (société écran) en rémunération de services rendus par un artiste en France sont imposables au nom de l’artiste en France  qu’il soit résident ou non résident en France lorsque l’une des conditions suivantes est remplie :

  • L’artiste contrôle directement ou indirectement la société écran qui perçoit la rémunération des services.
  • L’artiste n’établit pas que la société exerce de manière prépondérante, une activité industrielle ou commerciale autre que la prestation de services.
  • La société est domiciliée dans un état ou un territoire à fiscalité privilégiée soit dès lors que l’imposition est inférieure de 50% à celle applicable en France.

Cet article du code général des impôts a donné lieu à une jurisprudence abondante et dans certains cas précis, les artistes non résidents  peuvent échapper au fisc français…

En conclusion, face à un système d’imposition à multiples tiroirs, il est possible d’envisager intelligemment les options et renonciations diverses et variées.

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